Des écologistes sont parvenus à ralentir le train de déchets nucléaires allemand

BISCHHEIM (Bas-Rhin) et LILLE (Nord)

de nos envoyés spéciaux

La partie du convoi de déchets nucléaires allemands à destination du centre de retraitement britannique de Sellafield (Grande-Bretagne) a été retardé d'environ trois heures après une nuit agitée, émaillée d'incidents avec des écologistes. Vers 6 h 30, les douzes conteneurs de 100 tonnes emplis de combustibles usés quittaient la gare d'Amiens-Longueau (Somme). Là, ils avaient été séparés en deux convois, l'un de neuf conteneurs vers La Hague (Calvados), l'autre de trois conteneurs vers Dunkerque (Nord), d'où ils devaient embarquer à destination de Sellafield, en Angleterre.

C'est en Alsace que l'action la plus spectaculaire s'est produite. Mercredi 1er août, en fin d'après-midi, une quinzaine d'écologistes se sont retrouvés près de la gare de Bischheim, à côté de Strasbourg. Ils sont cachés de l'autre côté des voies, dans la Cité des écrivains, ensemble d'immeubles populaires où la police ne vient presque jamais.

Il y a là des antinucléaires de toujours, comme Gilbert, qui était à Creys-Malville en 1977, des anarchistes comme Guillaume, membre du récent Banan (Brigade anarchiste antinucléaire), des militants antimondialisation comme André, qui était à Gênes, il y a dix jours.
Des Allemands sont également venus, par solidarité. Des tracts, des chaînes, des combinaisons blanches étaient préparés, pendant que les jeunes de la Cité jouaient au foot.

JEU DE CACHE-CACHE

A 20 h 20, les groupes placés en amont ont prévenus au moyen d'un téléphone portable que le train arrivait. Les manifestants se alors précipités vers la voie, surprenant les policiers. Rapidement, Gilbert, short et torse nu, et Thomas, casquette et tee-shirt blanc, se sont enchaînés sous un rail. Les autres militants se sont assis sur les rails et ont allumé des fumigènes rouges. Mais le train avait arrêté plus haut. Cette action cependant perturbé le réseau ferroviaire régional et provoqué un retard estimé à environ quatre heures pour l'acheminement des déchets nucléaires.

Pendant ce temps-là à Lille, un groupe d'anti-nucléaire s'était dès 2 h 30 jeudi matin pour une nuit blanche, de bonne humeur et de longue attente.

La plupart  n'en étaient pourtant pas à leur coup d'essai. Le 25 avril, déjà, lors du passage d'un train de déchets nucléaires dans le Nord, ils avaient réussi à retarder le convoi d'une quarantaine de minutes en bloquant le train de marchandises qui le précédait.

Cette fois, la recherche du train a été longue et laborieuse : le convoi a accumulé les retards en raison des oppositions rencontrées sur son trajet ; et cette partie du convoi, à destination de Dunkerque, n'a pas emprunté l'itinéraire supposé par les militants. Il n'est pas passé, comme les fois précédentes, par Charleville-Mézières mais a bifurqué vers Amiens pour remonter vers Dunkerque, allongeant ainsi sensiblement la durée du parcours.

Durant une bonne partie de la nuit, des groupes d'écologistes lillois se sont éparpillés entre Béthune et Dunkerque et ont sillonné la campagne flamande à bord d'automobiles. A plusieurs reprises, ils se sont postés, drapeau vert à la main, le long de la voie ferrée, faisant stopper, à l'aide de quelques fumigènes, ici un train de marchandises, là un train de voyageurs quasi inoccupé à cette heure matinale.

A 9 heures, le train attendu n'était toujours pas passé mais les militants nordistes se sont promis de "remettre ça".

Vers 9 h 30, le train a, en fait, contourné Lille pour se diriger vers Dunkerque via Hazebrouk. Le jeu de cache-cache continuait.

Hervé Kempf et Nadia Lemaire